GEMALHING Jean

GEMALHING Jean
Réseau GALLIA-KASANGA
GEMALHING Jean

Jean Gemähling, Compagnon de la Libération, chef du service de renseignement des Mouvements unis de résistance (MUR) pendant la seconde guerre mondiale, est mort, vendredi 2 mai 2003, à Lagny (Seine–et-Marne), à l’âge de 90 ans.
Né le 19 novembre 1912 à Paris, ingénieur chimiste de formation, Jean Gemähling, alias Gabriel, puis Henriot sous la Résistance, prend part à la campagne de France au sein d’un groupe de reconnaissance divisionnaire d’infanterie en Alsace, avant de servir d’officier de liaison auprès du corps expéditionnaire britannique, en Belgique, dans le Nord, puis à Dunkerque. Il se trouve en permission à Clermont-Ferrand au moment de la débâcle.
Le 1er juin 1940, alors qu’il rejoint le bataillon anglais, il est évacué de Dunkerque à bord d’un destroyer anglais. Démobilisé, il regagne la France. Quelques jours plus tard, à Marseille – où il a décidé de rejoindre le général de Gaulle dès que possible – il rencontre Varian Fry, chargé par le Centre américain de secours de faire évacuer des artistes et intellectuels antinazis réfugiés en France, mais menacés d’arrestation par la Gestapo. Il s’occupe également de faire évader des aviateurs britanniques vers l’Afrique du Nord et l’Espagne.
Par l’intermédiaire de l’écrivain franco-russe Victor Serge, il prend contact avec le mouvement des Petites Ailes, que fonde Henri Fresnay, et qui devient, plus tard, le réseau de résistance COMBAT. Il songe déjà à mettre sur pied un SR, mais les dé-buts sont laborieux. Il s’agit plutôt, confiera-t-il modestement, « d’une collecte capricieuse de renseignements non regroupés, estimés à vue de nez et transmis au hasard de nos relations ». Jean Gemähling rencontre Henri Frenay par l’intermédiaire de Maurice Chevance (Bertin), dont il dira, avec son sens très personnel de l’ellipse :
« Je me rendis compte qu’il ferait certainement quelque chose ».
Jean Gemähling (Henriot) devient le chef du SR de Combat et s’y entend à merveille pour recruter de nouveaux agents.
Il est arrêté en novembre 1941 par la police de Vichy, puis mis en liberté provisoire en mai 1942 dans des conditions fort précaires de salubrité et d’alimentation qui lui vaudront un œdème. Il s’attache à organiser les réseaux, notamment à Lyon, Marseille, Nice, Montpellier, Toulouse, Limoges, Clermont-Ferrand et Vichy. En quelques semaines, chacune des six régions de la zone Sud fut dotée d’un responsable SR ; Jean Gemähling recrute un adjoint inattendu et très efficace l’écrivain et diplomate Benjamin Crémieux (Lamy), dont le fils, Francis, est l’un des piliers de Combat à Toulouse. Il transmet ses informations au Bureau central de renseignement et d’action (BCRA), le service gaulliste basé à Londres.
De nouveau arrêté à Marseille en décembre 1942, il réussit à s’évader en avril 1943 avec l’aide des membres de Combat, et il reprend ses activités clandestines depuis Lyon, où il dirige le service de renseignement des Mouvements unis de résistance (MUR), puis du Mouvement de la libération nationale (MLN).
Il va créer une branche spécialisée dans le renseignement militaire, très appréciée des Alliés et un service de sécurité destiné à prévenir les militants du MLN et d’autres résistants des risques nombreux qu’ils encourent du fait de leur traque par les polices allemandes et françaises, qui prend la suite des MUR et des mouvements Résistance et Défense de la France. Il met en place aussi un service de renseignement politique, social et économique.
Désormais, les renseignements recueillis seront transmis à Londres via Henri Gorce-Franklin et le réseau Gallia.
Henri Gorce-Franklin précise :
« comme chargé de mission du B.C.R.A.L. avec l’accord de Jean Moulin (Max), une entrevue avec le Comité Directeur des MUR eut lieu au milieu du mois de mai 1943. c’est au court de cette entrevue que Henri Fresnay, chef de Combat accepta, après beaucoup de difficultés, que les Mouvements unis de résistance (MUR) me passaient le contrôle de tout ce qui était S.R. Militaire avec une liaison technique directe avec le chef du SR des MUR : Jean Gemähling alias Henriot, avec un échange de courrier dans les deux sens. Par la suite je m’entendis fort bien avec Gemähling que j’aidais de mon mieux dans une tâche difficile. Le SR Mil des MUR devint RPA. » (Il fut rattaché au réseau GALLIA).

Réseau KASANGA

A partir d’octobre 1943, Jean Gemähling étend ses activités à l’ensemble de la zone Nord, notamment en Gironde, en Bretagne, en

Ile-de-France, en Lorraine et en Champagne, faisant de Paris la deuxième plaque tournante, après Lyon, du réseau.
Les services rendus lui vaudront d’être nommé lieutenant-colonel des Forces françaises combattantes (FFC) et le réseau de renseignement du MLN, qu’il a dirigé, est homologué par la France Combat-tante sous le nom de « Kasanga » et fait Compagnon de la Libération, le 17 novembre 1945.
Il fait partie des cabinets de Jacques Chaban-Delmas et Jacques Soustelle, ministre de l’information, mais il cesse ses fonctions quand André Malraux prend le poste.
Il fonde la revue Bilans hebdomadaires, une revue de documentation économique, sociale et politique, avant d’assurer, en 1948, la direction littéraire de la Société des Editions Défense de la France, créée par un grand résistant, Philipe Viannay. Il assura, ensuite, d’importantes fonctions en qualité de directeur-adjoint des matériaux et des combustibles nucléaires au Commissariat à l’énergie atomique (CEA) jusqu’à sa retraite en 1975.
Titulaire de la croix de guerre 1939-1945, Jean Gemähling était commandeur de la Légion d’honneur. La reconnaissance de ses pairs et les honneurs n’avaient pas entamé sa modestie naturelle et sa volonté de ne jamais se prévaloir de son action passée au service de la France Combattante et de la liberté.

Une partie de ce texte reprend l’article nécrologique publié dans le numéro du 8 mars 2003 du journal Le Monde.

Autres références :
– Souvenirs de Résistance de Henri Gorce-Franklin.
– Histoire de la Résistance en France d’Henri Noguères – Ed. Laffont.
– Fondation de la France Libre par François Broche.