Réseau Gallia-Reims

Réseau GALLIA-REIMS

Le réseau REIMS fut créé le 28 février 1943, sur les bases de l’agence BILL établie à Marseille par le major Pierre BOURRIEZ, chef belge de renseignement du réseau SABOT crée dès 1941 en France par la Sécurité Belge et NEMERY Jacques (pseudo Reims).

NEMERY Jacques désigne six chefs de région, tous belges, qui résideront respectivement à Monte-Carlo, à Cannes, à Toulon, à Marseille, à Nîmes et à Narbonne. L’agence BILL fonctionnait régulièrement à partir de décembre 1942, mais en janvier 1943 survient l’arrestation du major BOURRIEZ. Le fractionnement était nécessaire ainsi, NEMERY Jacques créait l’agence JENNY qui basée à Monte-Carlo devait travailler sur les Basses Alpes, les Alpes-Maritimes, le Var, la Corse et le plus rapidement possible essaimer vers l’Italie du Nord.

Le 28 février 1943, était donc créé le réseau REIMS, composé des Agences BILL et JENNY ainsi qu’un réseau belge de première heure mais désarticulé : SABOT (Agences MADELEINE – DELLY – GASTU – ALBERT et TOTY). L’agence BILL fut débaptisée pour en faire MADY dont tous les cadres étaient belges.

Le réseau REIMS transmet un rapport hebdomadaire à Londres, accompagné de critiques du chef de réseau. Malheureusement, en mai 1943, un agent commet une imprudence qui déclenchera des arrestations en cascades et ininterrompues. Un important « contact hors réseau », promettant de fournir de « gros renseignements », s’avéra n’être qu’un « double ». La Gestapo de Marseille s’acharnera sur les Agences. Cet agent avait pourtant l’interdiction de son chef de prendre tout contact. La Police française s’en mêla par l’intermédiaire de l’inspecteur Besse Pierre qui arrêta STUCKY, agent français de l’Agence MADY, pour le remettre à la Gestapo. Une perquisition chez STUCKY permit l’arrestation de MATHERON, de SCHERER Aline et la découverte d’un code utilisé par le G.Q.G. de la Luftwaffe. D’autres honorables correspondants furent arrêtés à la même époque.

Nous sommes au début de juin 1943 : l’Agence MADY est complètement détruite, l’Agence JENNY, bien que décapitée, est intacte, l’Agence GUY est dans « l’air », c’est-à-dire que tous ses contacts sont rompus. Alpes DELLY est intacte ainsi que le Poste de Commandement. Mais, et c’est le plus grave, tout contact est perdu avec l’extérieur, avec Londres. Le problème consiste donc à retrouver les liaisons, à reconstituer les Agences et à réorganiser le Poste de Commandement, autant que possible, dans une autre région. Ce sera fait. Le professeur FEUILLOLEY Alban reconstitue l’Agence MADY, entièrement française. C’est lui qui proposera à NEMERY Jacques alias Reims, le docteur BROSSE Thérèse alias Clary qui accepte une nouvelle Agence CLARY dans le Centre.

Il est décidé de remettre provisoirement l’ensemble de nos rapports au responsable de la région Sud-est du réseau GALLIA : le colonel LANOYERIE, à Grenoble qui, par son PC Central à Lyon, est en liaison directe avec le B.C.R.A. à Londres.

Depuis juillet 1943, une entrevue avec le chef d’un important réseau est effectuée et c’est précisément le colonel Henri GORCE-FRANKLIN – chef du réseau GALLIA –

qui se déplace à Grenoble. Henri GORCE-FRANKLIN offre de donner à REIMS la liaison souhaitée, mais à condition que le réseau, autonome, mais par l’intermédiaire de GALLIA, passe aux ordres du B.C.R.A. et ne passe plus par la Sûreté belge à Londres. Il faut dire que 98% des agents de REIMS sont français. La Sûreté belge ne répondra à REIMS, par message à la B.B.C., qu’après que l’accord ait été réalisé entre REIMS et GALLIA (B.C.R.A.). Séance tenante, toutes dispositions sont prises en matière de liaisons et de financement. Fin novembre 1943, l’accord sera entériné au cours d’une réunion à laquelle participèrent le Colonel PASSY, le Commandant MANUEL, Messieurs LEPAGE et UGEUX William hauts fonctionnaires de la Sûreté belge, d’un officier de liaison britannique et le chef de réseau : NEMERY Jacques alias Reims.

Pour le réseau GALLIA, le réseau REIMS devint le réseau RP B et plus tard NOËL-COTY.

En juillet donc, NEMERY Jacques alias Reims convoque les chefs d’Agences à Grenoble et leur annonce que le réseau, devenu français, recommence à fonctionner, fort de l’appui du réseau GALLIA. Le réseau REIMS était composé des Agences :

– Agence GUY : région Sud-ouest et qui essaimera vers le Nord et créa jusqu’à Lille une quinzaine de sous agences,

– Agence DELLY : région de Grenoble et Lyon

– Agence JENNY : région du Sud-est et prend pied en Italie du Nord,

– Agence CLARY-VICTOIRE : région du Centre couvre 11 départements,

– Agence MADY : région de Marseille et de Perpignan,

– PC Central : à Grenoble,

– LORRAINE : Regroupement en Belgique et en Hollande diverses petites organisations de passeurs et d’évadés,

– Groupe de secteur PARY : zone Nord y compris Paris,

– Groupe FER : agents de la SNCF.

30% des agents engagés entre le 1er août 1943 et le 31 décembre 1943 (58 sur 190) sont morts ou furent déportés – 59,37% des agents P2.

C’est en août-septembre 1943, que le réseau REIMS débuta une nouvelle branche de son activité, l’expérience avait montré combien il était dangereux de confier à ces agents de renseignement des missions de contre-espionnage. Il fallait un réseau de « doubles » et d’agents spécialisés qui se juxtaposaient à l’organisation existante, sans s’y confondre.

Novembre 1943, mission à Londres du chef de réseau REIMS, NEMERY Jacques alias Reims.

Deux questions importantes restaient à résoudre :

1. L’extension du réseau vers l’Italie,

2. L’accord définitif de la Sûreté belge quant au passage du réseau au B.C.R.A..

En novembre 1943, NEMERY Jacques alias Reims par en Lysander pour Londres. À Londres, il est décidé que le réseau Reims restait français sous réserve qu’il transmette à la Sûreté belge une copie de certaines informations et qu’il organise au profit de ladite Sûreté, un service de passage et d’évasions.

Le retour en France de NEMERY Jacques alias Reims ne put s’effectuer en décembre 1943 et janvier 1944 et c’est OREEL Georges alias NOËL qui devait être, en conséquence, confirmé dans ses fonctions.

Le réseau REIMS devint NOËL.

Fin 1943, le réseau REIMS va être, en même temps que le réseau GALLIA, cité à l’ordre du jour de l’armée par le Général de Gaulle. Le réseau REIMS était devenu un grand réseau national et déjà, débordait sur l’Italie. Outre sans y faire du renseignement, mais uniquement de l’évasion, il était implanté en Belgique et Hollande pour l’évacuation des agents « brûlés ». 366 agents sont dispersés sur tout le territoire français en deux groupes cloisonnés (renseignement et contre renseignement) dont les subdivisions régionales sont jumelles. À la Libération, ils seront plus de mille agents…

Les liaisons, grâce à un vigoureux système de cloisonnement, grâce aussi aux contacts réalisés depuis mai 1943 par STUCKY avec les milieux cheminots, fonctionnent sans à coups. Chaque semaine, le réseau faisait la synthèse des renseignements venus de toutes les dactylos travaillant presque sans relâche.

Mais d’autres drames allaient arriver. A Londres, le service de synthèse Palace Street, signalait au chef de réseau NEMERY Jacques alias Reims que certains renseignements émanant de REIMS étaient, mot à mot, identiques à certains rapports venus d’autres réseaux. En février 1944, Henri GORCE-FRANKLIN, de passage à Londres, priait NEMERY Jacques alias Reims de lui remettre, à destination de Georges OREEL des instructions impératives le priant d’abandonner tout contact autre que celui qu’il tenait sur le B.C.R.A..

La prise du P.C. de Chambéry eut pour suite l’arrestation d’au moins trente agents. Le 30 mai 1944, Georges

OREEL et ses adjoints sont arrêtés par le Sicherheitsdienst (Gestapo). Georges OREEL, en cours de route, tente de s’évader. Il est abattu sur place à la mitraillette. Tous les hommes furent fusillés au cours du mois de juin 1944 et juillet 1944, seulement deux agents furent déportés…

La Gestapo de Lyon écrit : « II est remarqué que cette organisation était un modèle dans le genre, qu’elle était la plus sévère et la mieux organisée tant sur le plan de vue sociale qu’au point de vue service de renseignements ». N’empêche que la Gestapo avait entre les mains le code du réseau pour décrypter, en autre, la liste des agents du réseau. Et, ou tout semblait être perdu, le code disparaîtra de chez l’ennemi : perte ou vol, Le réseau REIMS était probablement redevable de cette disparition à un agent issu d’un autre réseau et travaillait en « double » à la Gestapo. Il est à remarquer que le réseau GALLIA contrôlait un réseau spécialisé à Lyon : le réseau DUPLEIX. Ce S.R., créé en juillet 1943, devait devenir une aide précieuse pour les réseaux du B.C.R.A. par l’intermédiaire du réseau GALLIA, grâce à ses systèmes d’alertes. Dès le début, des rapports furent établis avec certains éléments de la Gestapo. Des contacts furent effectués tant auprès des personnalités administratives, police politique, commissariat. Le réseau DUPLEIX se spécialisa dans le renseignement policier – il faut évidemment entendre par là le contre-espionnage. Est-ce ce réseau DUPLEIX qui réussit à subtiliser ce « fameux code » ?… Toujours est-il que brusquement cette affaire s’est interrompue. C’est de cette façon que fut épargnée la plus grosse partie des Agences, MADY et DELLY en particulier, celle desservant Grenoble et sa région. Mais pour les autres Agences, c’est une catastrophe. À Vichy, le docteur BROSSE Thérèse se voit remettre sous le nez la transcription décodée de la liste complète de ses agents. Le docteur BROSSE Thérèse alias Clary, chef régional de l’Agence CLARY, forte de 120 agents, devait retrouver bon nombre des siens à la sinistre prison allemande de Moulins sur Allier. »

À la Libération, le réseau REIMS avait 16.000 dossiers de contre renseignement à mettre à la disposition de la D.G.E.R..

Source : Extraits des Archives GALLIA